La cheffe Georgiana Viou : "A Nîmes, j'ai évolué, j'ai grandi"

Vous venez de publier Oui Cheffe !, un livre qui retrace votre parcours, du Bénin à l’étoile au Michelin. Comment est né ce projet ?

Mes copines m’ont toujours dit : « Ta vie, c’est un roman, il faut que tu la racontes… » En parallèle, mon ami Olivier Montels (ancien directeur des antennes de France télévisions, NDLR) m’avait plusieurs fois sollicité pour écrire quelque chose. On s’est revu pendant le Covid, il m’en a reparlé et a rédigé une quinzaine de lignes sur le sujet pour le proposer à des éditeurs. Michel-Lafon, le premier auquel il l'a proposé, a accepté tout de suite. Voilà comment ça a démarré.

Comment avez-vous travaillé ?

Moi j’écrivais, beaucoup, sans vraiment de forme et je lui envoyais ma production. Et puis on échangeait, beaucoup. Olivier a aussi rencontré des proches, il a interviewé ma mère, mon frère et d’autres personnes au Bénin. Ce livre, c’est avant tout un témoignage.

Il est sous-titré « itinéraire d’une battante ». Pourquoi ?

Je ne raconte pas tout, bien sûr, mais je ne cache pas mes fêlures. J’y parle de mon enfance entourée de femmes, d’un drame vécu à l’adolescence, des galères lorsque je suis arrivée à Paris... Mon parcours n’est pas unique, mais il est sans doute atypique. Je suis tombée, plusieurs fois. Je me suis relevée, je suis repartie. On a tous des plafonds de verre qu’on n’arrive pas à briser. Alors si cela peut inspirer ou aider une seule personne à y parvenir, c’est cool.

Vous êtes et resterez la première femme africaine étoilé. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

Jusqu’à récemment, je ne trouvais pas ça important. Oui, je suis une femme, oui je suis noire, et alors ? Ce ne sont ni des arguments, ni des critères pour juger mon travail. Mais malgré moi, je suis devenue une forme de symbole et j’ai réalisé que c’était important pour certaines personnes, parce qu’on me le répétait. Il faut que je l’accepte. Maintenant que j’ai la chance d’avoir un peu d’exposition, je dois valoriser cette étoile, pas en allant prendre des gros cachets à droite ou à gauche mais en portant des messages, pour les femmes, pour toutes celles qui sont derrière et que l’on voit moins.

Vous êtes à Nîmes depuis maintenant quatre ans. De quoi vous sentir un peu Nîmoise ?

J’ai très vite trouvé mes marques ici. J’ai des affinités avec les Nîmois, car comme eux, sous une forme de pudeur, je dissimule en fait beaucoup de sentiments et de chaleur. J’ai l’impression d’être acceptée. Quelle que soit la suite de mon parcours, Nîmes restera à jamais dans mon ADN, cette ville m’a énormément apporté. Ici, j’ai évolué, j'ai grandi.